Le sujet de la saisissabilité de l’épargne et des contrats d’assurance-vie en particulier est un sujet souvent évoqué par les épargnants. Mais entre confusion et méconnaissance, qu’en-est-il réellement? Un contrat d’assurance-vie est-il saisissable?
L’assurance-vie, avec ses avantages en matière de planification financière, de transmission de patrimoine et de sécurité financière, est devenue un pilier incontournable de la gestion de l’épargne pour de nombreux individus. Cependant, une question cruciale qui préoccupe souvent les titulaires de contrats d’assurance-vie est la suivante : « Un contrat d’assurance-vie est-il saisissable ? » Cette interrogation trouve sa source dans l’inquiétude légitime de protéger ses actifs en cas de difficultés financières ou de litiges juridiques.
Dans cet article, nous plongerons au cœur de cette question complexe et controversée, en explorant les différentes facettes des lois et de la jurisprudence qui encadrent la saisissabilité des contrats d’assurance-vie. Nous démêlerons les mythes des réalités, en mettant en lumière les protections légales offertes par ce type de contrat, tout en exposant les situations spécifiques où il peut être vulnérable aux créanciers.
L’assurance-vie, insaisissable juridiquement
Toute la question de la saisissabilité de l’assurance-vie vient d’un texte, et d’un article bien précis. Il s’agit de l’article 1205 du code civil. Celui prévoit, justement, le mécanisme de la stipulation pour autrui. Plus précisément, l’article dit la chose suivante:
« L’un des contractants, le stipulant, peut faire promettre à l’autre, le promettant, d’accomplir une prestation au profit d’un tiers, le bénéficiaire. Ce dernier peut être une personne future mais doit être précisément désigné ou pouvoir être déterminé lors de l’exécution de la promesse »
Et ce texte de conséquences sur l’assurance-vie. Le mécanisme de la stipulation pour autrui implique:
- L’insaisissabilité.
- le cadre hors succession du contrat d’assurance vie.
Le code des assurances établit clairement que les créanciers du souscripteur d’un contrat d’assurance ne peuvent pas réclamer le capital ou la rente garantis en faveur d’un bénéficiaire spécifique. Leurs droits se limitent au remboursement des primes, en accord avec les dispositions énoncées dans l’article L. 132-13, deuxième alinéa du code des assurances, conformément soit à l’article 1167 du code civil, soit aux articles L. 621-107 et L. 621-108 du code de commerce. Dans le même temps, la jurisprudence de la Cour de cassation a établi de manière constante que l’assurance-vie est inviolable.
Dans ce contexte, il est important de noter que certains souscripteurs, notamment des chefs d’entreprise en difficulté financière, ont pu échapper à leurs obligations financières en organisant leur insolvabilité par le biais de souscriptions aisées et rapides de contrats d’assurance-vie, parfois même à l’étranger.
Mais une loi qui s’est adapté
Au fil du temps, la législation a progressivement introduit des exceptions à la règle de l’insaisissabilité des contrats d’assurance-vie.
À cet égard, la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 a marqué une évolution significative en insérant un article 706-155 dans le code de procédure pénale, autorisant la confiscation d’une assurance-vie lorsque les fonds investis ont une origine frauduleuse ou sont issus d’une infraction pénale. Cependant, la Cour de cassation a restreint la portée juridique de ces saisies, limitant leur effet à un blocage immédiat des fonds, qui demeurent donc « gelés » et ne peuvent être transférés (Cour de cassation, chambre criminelle, 8 janvier 2014, n° 12-88.072).
Par ailleurs, la loi du 6 décembre 2013 a renforcé l’arsenal législatif en matière de justice pénale en permettant au tribunal de prononcer une peine de confiscation de l’assurance-vie. Cette décision entraîne la « résolution judiciaire » du contrat, ce qui signifie que l’existence du contrat est rétroactivement annulée, et les fonds sont transférés pour rembourser la dette.
Enfin, la loi du 6 décembre 2013 a également accordé à l’administration fiscale le droit de procéder à des saisies sur des contrats d’assurance-vie, même en cas de fraude, pour recouvrer des impôts impayés.
Ces exceptions à la règle de l’insaisissabilité des contrats d’assurance-vie illustrent la manière dont la législation évolue pour prendre en compte les situations spécifiques liées à l’origine des fonds et aux impératifs de justice.